Ah, mais ta gueule!

Il m'arrive régulièrement de réagir à un propos débile entendu à la télé par cette phrase (oui, je parle beaucoup tout seul, il n'y a pas à s'inquiéter). Notamment lorsque je regarde du sport. Et notamment sur France Télévision, où on trouve tout de même une belle brochette de branquignols parmi les commentateurs. Mais pour être tout à fait honnête, je dois dire que souvent je surjoue quelque peu. Enfin, disons qu'étant donné que je m'attends à ce que le mec dise une énormité à un moment ou un autre, le fait de lui demander de fermer sa gueule est complètement prémédité. Et il s'agit juste d'attendre le moment où je juge que "c'en est trop, ce type est un naze". C'est d'ailleurs un peu la même chose avec le hommes et femmes politiques. Par exemple, si Xavier Bertarnd est l'invité principal du Grand Journal, je serai forcément prêt à prononcer mon "ah, mais ta gueule!" à tout moment.

Mais l'autre soir en regardant le JT, la phrase est sortie de ma bouche sans que je m'y attende (de l'ordre du jaillissement). Et du coup, accompagnée d'un véritable sentiment de colère. Ca m'a presque fait tout drôle (imagine that: "presque tout drôle").
Le sujet était ultra sensible. C'était la baisse du prix des fruits et légumes (pour le consommateur) depuis l'an dernier. Voilà, apparemment les chiffres sont là, ça a baissé. Et sans pour autant dire que "si on nous le dit à la télé, c'est que c'est vrai", je me dis que si ils font un sujet là-dessus, il est assez peu probable qu'ils le fassent -dans le cas présent (encore une fois: le prix des fruits et légumes)- dans un soucis de manipulation des masses (et à des fins totalitaires) au moyen de la diffusion de contre-vérités (pour ne pas dire de mensonges). Donc c'est moins cher... Hmm, d'accord.
Et puisqu'un bon sujet "consommation et société" à la télé semble de nos jours ne plus pouvoir se faire sans y adjoindre le micro-trottoir témoin de rigueur, et bien on a eu le droit à la réaction de la femme de la rue (non, pas la prostituée... la ménagère): "ah bon? Moi j'ai plutôt l'impression du contraire... que ça a augmenté" (en substance). Et c'est là que j'ai lâché le "ah, mais ta gueule!" rageur.

Parce que voilà, on passe tellement de temps à dire que les prix augmentent, que le pouvoir d'achat ceci, ouin-ouin et tralala (maintenant, toutes les 2 semaines on a le droit au sujet "ah, le prix de l'essence va augmenter, c'est irréversible selon les experts"... puis "ah, le prix de l'essence va baisser, c'est la crise; les experts sont formels". Le tout accompagner de micro-trottoir à la pompe "bah moi, je vois pas la différence, je crois que quand le baril monte, l'essence augmente tout de suite, mais quand le baril baisse, c'est pas la même histoire hein..." -sur un ton mi-bovin, mi-les vrais gens me comprennent-)... Oui donc, disais-je avant d'être interrompu par les ploucs, ce discours est tellement répandu que désormais le crétin moyen se sent autorisé à donner ses "impressions" (de merde, qui plus est) dès qu'on lui tend un micro. Or, quelqu'un est il en mesure de me dire ce qu'est une putain d'"impression" en terme d'augmentation ou de baisse des prix? Parce que l'avantage des prix, c'est que ce sont des chiffres. Ce qui laisse peu de place au feeling et à l'"impression".
Donc de deux choses l'une: soit tu as des références en tête, des prix exacts de produits que tu as retenu d'une année sur l'autre, et auquel cas, ok, je t'accorde le droit de t'exprimer sur le sujet et éventuellement de dire que ce qu'on t'annonce est faux (enfin, on vérifiera quand même). Soit tu n'as que des impressions (qui ne sont en réalité que des préjugés et le résultat de ton manque d'indépendance intellectuelle), et je t'invite alors à décliner cordialement l'invitation du micro et de la caméra et à te taire avant que j'aie à te le dire de façon plus virulente. Parce que ça me fatigue à la fin.

















Hard times: jeune ménagère ayant dépensé tout ses sous dans des légumes, et n'ayant plus rien à se mettre.

Comments

[ALF]

Juste pour saluer la recrudescence d'illustrations de jeunes filles slaves qui m'aident à chaque fois à comprendre par l'exemple l'article auquel elles sont rattachées...